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AHMADOU KOUROUMA, L’ENFANT
TERRIBLE DE LA COTE D’IVOIRE

Rémi Fougères
Bronx Journal Staff Reporter

Ahmadou Kourouma est aujourd'hui sans conteste l'écrivain le plus en vogue de toute l'Afrique continentale. Ses livres se vendent par centaines de milliers à travers le monde francophone et sont enseignés dans les collèges au même titre que les grands classiques.

 

Néanmoins cette renommée étourdissante ne s’est pas acquise sans labeurs.À elle seule la vie d’Ahmadou Kourouma est un roman, l'histoire d'une voix qui s’élève dans le désert africain de la libre expression.
Né en 1927 dans la province nord de la Côte d’Ivoire, le Sahel, le nouveau né Kourouma est élevé par son oncle infirmier, chasseur, musulman et féticheur (prêtre des religions à fétiches).
Alors plongé au coeur des traditions de son pays, Ahmadou s'imprègne de ce qui sera plus tard le terreau fertile de sa production artistique: la culture malinké.
Après des études secondaires effectuées brillamment, il part à Bamako au Mali pour intégrer l’Ecole Technique Superieure. Mais le vent tourne: en 1949, il est accusé d’avoir endossé le rôle de "meneur" lors d une manifestation estudiantine indépendantiste. Il est alors banni du Mali.
Un malheur n’arrivant jamais seul, l’étudiant déchu se voit dès lors dépourvu de son statut sursitaire et contraint de se mettre au service de l'armée francaise. C'en est trop pour Ahmadou qui se retrouve, à son insu, chargé de la répression des indépendantistes de l Afrique de l'Ouest.
Pour soulager sa conscience, il s'envole pour l'autre zone sensible des colonies francaise: L Indochine, où il servira en tant que tirailleur pendant quatre ans.
Remercié pour ses bons et loyaux services, Ahmadou Kourouma peut alors se concentrer à nouveau sur ses études. Il réussit haut la main le concours d'entré de L'Ecole de Construction Aéronautique et Navale de Nantes.
Mais faute de débouchés, il doit reconsidérer ses ambitions et opte finalement pour la voie des assurances en intégrant l'Institut des Actuaires de Lyon.
En 1960 le soleil se lève enfin sur une Côte d’ Ivoire indépendante. C est l’occasion pour Ahmadou, marié depuis peu à une Francaise, de retourner sur sa terre natale.

Hélas, le nouvel homme fort du pays, le président Houphouet-Boigny, ne l’accueille pas à bras ouverts. L’accusant de comploter contre le peuple, il le fait emprisonner. Marié officiellement à une francaise, il échappe à la torture, mais se voit privé du droit fondamental de travailler.
Cette période de mise au banc de touche lui permet la rédaction de son premier roman, Les Soleils des indépendances. Armé d'une écriture si singulière, emprunte de l’esprit malinké, le roman pointe du doigt et dénonce les problèmes qui gangrènent sa societé contemporaine: l'arbitraire, la place de la femme, l excision…
Hélas les éditeurs manquent à l’appel.Aussi décide-t-il de faire ses bagages pour l'Algérie où l'on recrute des actuaires à la pelle.
En 1967, les Lettres Francaise de L’Universite de Montréal décernent leur prix au manuscrit que Kourouma leur avait fait parvenir à tout hasard. Enfin la reconnaissance, il sort de l 'ombre.
En 1970 les Editions du Seuil finissent, mais un peu tard, par publier sa première oeuvre. C est le sacre de l’auteur ivoirien.
De retour en Côte D'Ivoire, il met cinq ans avant de publier une pièce de théâtre: Le Diseur de verité. Qualifiée de "pièce révolutionnaire"par l'ambassadeur de France, Houphouet-Boigny exile Kourouma de nouveau mais cette fois-ci par le haut: Kourouma sera directeur général de l'Institut International des Assurances à Yaoundé au Cameroun. Ainsi trop occupé à ses activités actuarielles, sa carrière d’écrivain est mise en abîme.
En 1990, il sort de sa torpeur artistique et publie Monné, outrages et défis qui traite une fois de plus des méfaits de la
colonisation, du rôle des femmes et des conflits interculturels.
Fatigué, l'actuaire prend sa retraite en 1994 et retourne à Abidjan. C'est alors l'occasion de se consacrer pleinement à l'écriture.Il signe son troisième roman, En attendant le vote des bêtes sauvages .Les maux qui rongent l'Afrique postcoloniale sont encore pointés l'un après l'autre: tyrannie, anarchie, pauvreté, gabégie, corruption, naïveté…le tout articulé par un anti-héros, l'ubuesque Koyaga, évoluant dans un monde où la magie est inhérente.
Succès auprès des critiques et des librairies. Le prix du Livre Inter vient même s’ajouter à cette réussite.
Mais l'écrivain ne s’arrête pas pour autant. Allah n’est pas obligé est paru cette année.Comme le lui avaient suggérer des enfants lors d une conférence, le livre traite de la pire gangrène du continent:les guerres tribales. C’est d’ ailleurs un enfant de 12 ans, Birahima, qui en est le protagoniste. Et c est à travers son regard que Kourouma, dans un style volontairement naïf, décrit les funestes massacres qui eurent lieu en Sierra Leone et au Liberia.
L’ensemble de l' oeuvre de Kourouma n’est pas une ode optimiste à l'Afrique contemporaine. Néanmoins l'écrivain reste serein sur l’avenir du continent. Selon lui l' Afrique aurait désormais acquis l'élément indispensable au maintien de la démocratie: la parole.

 

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