souffles
numéro 12, quatrième trimestre 1968hocine tandjaoui : l'attente de l'arche
pp. 44-45
| Incursions. Jeux avec le temps : parfois, il s'allonge,
d'autres, il se rétrécit. C'est ainsi qu'est -- que fut surtout
-- ma vie. 20 ans. On divague à peine. J'estime que c'est beaucoup.
Prenez un fil de fer en forme de sinusoïde, faites-lui subir de multiples
contorsions, surtout sans ordre, jusqu'à ce qu'il vous soit impossible
d'aller plus loin sans avoir l'impression angoissante de frôler la
catastrophe : l'objet n'obéit désormais à aucune loi,
si ce n'est celle de votre main guidée par ce qu'on appellera par
commodité le hasard.
Sclérose, paralysie, puis mort. Le schéma est classique. Début de sclérose, réaction de l'organisme, rejet du virus. C'est la révolte. La montagne n'est sans doute pas la solution. Au col de Tighoughda les oiseaux s'emmerdent parmi les cèdres. Je les ai vus. H. Tandjaoui. Né à Constantine. 20 ans. |
l'attente de l'arche
votre univers est une morgue
dont vous êtes les gardiens et les morts
les victimes et les bourreaux
un univers morgue jonché de cadavres
puant dont la décomposition lente
depuis des siècles a vicié l'air
ce même air que vous respirez
laissez donc échapper cette mort
que vous brandissez épouvantail décharné
ce ne sera plus alors une morgue
s'il n'y a pas de mort à garder
et peut-être le feu vous prodiguera-t-il
sa brûlante douceur
un asile
un asile cerné
de mes blokhaus
pour mes nuits
pour toutes ces nuits
de gros nuages
sèment la panique
parmi les étendards immaculés
qui n'ont peut-être jamais existé
puis
se sont emparés de tout ce qui
est
entre temps mort et vie
alternativement
je veux
j'exige un asile pour ces nuits
juillet 2000