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L'équipe de SOUFFLES a réuni dans les pages qui suivent le minimum de renseignements nécessaires à la connaissance des données historiques, sociales, économiques et révolutionnaires des pays africains dont les peuples luttent aujourd'hui (et dans leur quasi-totalité les armes à la main) contre le colonialisme ou les régimes néo-coloniaux.
Nous avons tenu à les réunir dans une même rubrique pour souligner encore une fois l'unité du combat des peuples africains et surtout pour rendre Justice à certaines luttes qui, pour diverses raisons, sont encore moins connues que d'autres.


afrique, un seul et même combat

pp. 46-48


sahara occidental


     266 000 km2 de sable, 240 000 habitants et une petite ville de moins de10 000 habitants ; trois quart de siècle de présence espagnole, une action concertée et de plus en plus accélérée de mainmise impérialiste patronnée par les U.S.A. ; timides revendications d'intégration puis action diplomatique en commun émanant du Maroc, de la Mauritanie et de l'Algérie et visant à décoloniser : telles sont les données principales du problème du Sahara Occidental dit Espagnol.

     Au niveau de l'actualité ceci s'est traduit, pour l'année dernière, par, d'une part une consolidation des liens colonialo-impérialistes sur les plans économique et militaire, d'autre part par une série de rencontres au sommet entre les trois chefs des états limitrophes.

     L'événement à la fois nouveau et de signification profonde étant les violentes manifestations de Al Aioun en juin dernier.

     L'envergure et les formes nouvelles que prend la politique du colonisateur, l'inefficacité de l'action de décolonisation menée jusqu'ici par des états ou par des partis politiques, la réaction violente des masses d'Al Aioun, constituent autant de facteurs dont l'analyse révélera que ce problème obéit à une dynamique dépassant la zone.

     Le Sahara Occidental, fait colonial, est en train de devenir fait impérialiste. Cette dynamique une fois saisie permettra de jeter un éclairage nouveau sur les différentes solutions jusqu'ici proposées et peut-être d'esquisser la seule solution véritable.

Le Sahara Occidental du fait colonial au fait impérialiste

     C'est au terme d'un certain nombre de traités de partage entre la France et l'Espagne que le Rio de Oro est devenu à partir de 1904 une « province espagnole », sa voie d'accès étant jusqu'en 1960 la ville de Tarfaya actuellement ville marocaine. Les indépendances, libéralement négociées et libéralement accordées ou octroyéss selon le cas, du Maroc puis de la Mauritanie, ont semblé constituer, pour un court moment, une première étape qui serait suivie par d'autres. Puis très vite, on assista à une volte-face du gouvernement esnagnol. L'attitude bienveillante vis-à-vis de Rabat, libérale vis-à-vis de maintes sessions de l'O.N.U. cède la place aux manœuvres. Le gouvernement de Madrid entend désormais organiser lui-même la décolonisation, et dans des conditions tracées par lui : un référendum « sérieusement préparé » est annoncé. Le but : créer un état fantoche pour éterniser une présence de plus en plus menacée, quitte à la couler dans un moule nouveau : la présence impérialiste capable de s'accomoder des formes de domination politique les plus souples.

     Les derniers accords entre le gouvernement fasciste et Washington sur le plan stratégique et les arrangements entre le capitalisme espagnol et les banques d'affaires basées en France mais dépendant du grand capital yankee, montrent que le Sahara Occidental est devenu, un enjeu présentant un interêt impérialiste multi-national double, à la fois militaire et économique.

     L'intérêt économique se justifie par la découverte de grandes réserves de pétrole dans la partie sud du territoire et par l'impor-tance du gisement phosphatier de Bou Craa.

     Sur le plan stratégique, la chute de la monarchie libyenne et la perte des bases américaines dans cette région ont imposé à l'impérialisme la nécessité de trouver une autre tête-de-pont dans la partie occidentale du monde arabe, Israël ne suffisant plus pour contrôler la poussée anti-impérialiste et révolutionnaire qui, depuis 1965, secoue de plus en plus vigoureusement toute la Nation Arabe. Un territoire de 260 000 km2, pour une population arabe ne dépassant pas 240 000 habitants, offre les conditions idéales pour greffer un autre Israël sur ce flanc de la Patrie Arabe.

Les Pseudo-solutions

     II est évident que le manque d'une indépendance truquée visant la création d'un Etat fantoche n'est qu'un voile transparent qui ne peut cacher les desseins impérialistes.

     Il semble par contre que les différentes solutions proposées par les uns et les autres jusqu'ici soient de nature à réaliser l'essentiel : liquider la présence coloniale. En effet, aussi bien les partisans d'une intégration pure et simple que les partisans d'une solution de partage, et l'O.N.U. avec eux, tous semblent d'accord sur ce point. Le principe de la décolonisation pris dans l'absolu est inscrit depuis des décades sur la table des valeurs internationales et les pires ennemis des peuples l'ont maintes fois défendu avec ferveur. Il suffit pour les états limitrophes de se mettre d'accord, de régler certaines chicanes de procédure avec l'Espagne et tout est parti pour un référendum de décolonisation. Tout paraît très simple et l'essentiel pourrait être réalisé le plus libéralement possible et à travers les méthodes les plus pacifiques. Tout paraît très simple si l'on continue encore de nos jours, et après bien des expériences édifiantes, d'ignorer cette dynamique qui transforme tout fait colonial en fait impérialiste. Toute décolonisation qui ne tient pas compte de cette vérité est vouée à l'échec. Concernant le Sahara Occidental, on ne saurait concevoir une solution radicale en dehors du processus global de la Révolution Arabe. A la lumière de cette vérité, attardons-nous un moment à examiner les solutions proposées pour déceler leur inconséquence.

     Du côté marocain, tout le monde est unanime à dire que le Sahara Occidental est une partie indissociable de « la mère patrie ». Des arguments historiques, géographiques et économiques sont invoqués.

     II est vrai que les frontières actuelles ne sont dues qu'à l'arbitraire de la colonisation. Les habitants du Sahara ont toujours ignoré les frontières et continuent à les ignorer, mais il s'agit de tous les bédouins, de tout le Sahara qu'il soit aujourd'hui algérien, marocain ou mauritanien. Cet arbitraire dépasse, d'ailleurs, largement la partie occidentale de la patrie arabe. La partie orientale de notre patrie a connu le même phénomène de balkanisation, ne tenant compte ni de l'histoire, ni des réalités ethnico-culturelles, mais répondant exclusivement au jeu d'intérêts et de concurrence colonialo-impérialiste. Toute remise en question aujourd'hui n'aboutirait qu'à une seule vérité : la patrie arabe est une et indivisible.

     On ne peut pas non plus s'appuyer sur des critères ethniques pour défendre l'intégration du Sahara Occidental à l'un ou l'autre des Etats limitrophes. La similoitude entre l'arabe du Sahara Occidental et l'arabe du Draa est la même entre ce dernier et un habitant du Sahara algérien ou mauritanien. Toute spéculation ethnique n'aboutit en définitive qu'à démontrer que tous les arabes sont des arabes. Et ceci est bien connu des masses et profondément ressenti par elles. Ce qu'on s'est efforcé par contre de leur apprendre après les indépendances, c'est qu'elles étaient d'abord algériennes, d'abord marocaines ; autrement dit, les élites arabes se sont évertuées parfois à balkaniser la conscience arabe après la balkanisation de la terre arabe par le colonialisme.

     Certes, les péripéties de l'histoire coloniale, la variabilité régionale du colonialisme ont imposé des solidarités différenciées entre des hommes qui avaient à liquider chacun son ennemi respectif. Ceci s'est traduit par la naissance et le développement de plusieurs nationalismes arabes (marocain, algérien, syrien etc...), efficaces tactiquement, mais voués a l'échec stratégiquement. La pratique colonialiste fut différente au Maroc de ce qu'elle fut en Algérie. Une réplique marocaine ou algérienne spécifique fut juste tactiquement. Mais l'incapacité, pour des raisons relatives aux classes sociales qui ont organisé et dirigé ces répliques, de les dépasser dans une stratégie arabe a tôt fait de faire écrater des contradictions. Ce qui montre fort bien que la dynamique du colonialisme et ses mutations néo-colonialo- impérialistes ne peuvent se combattre radicalement que par la dynamique d'une révolution arabe.

     L'histoire post-coloniale du monde arabe nous enseigne que les Etats nés de la décolonisation se débattent dans une contradiction. Leur position de classe se traduit par une politique anti-coloniale inconséquente et ne leur permet pas de s'intégrer au processus révolutionnaire. Le développement de la résistance palestinienne a rarement précipité plusieurs « champions » de la lutte anti-colonialiste et anti-impérialiste dans le camp de la contre-révolution. Le plan Rogers a fait couler beaucoup de sang, mais ce fut aussi la première opération chirurgicale. L'artillerie de Hussein défendait un état avec une ardeur jamais vue chaque fois qu'il s'agissait de défendre la terre contre l'envahisssur sioniste. Elle tirait sur tout et sur tous, enseignant que chaque homme du peuple est, en fait ou en puissance, un ennemi de l'état. Une nouvelle solidarité arabe à la base est née comme réplique à la solidarité, teintée de contradictions secondaires, des sommets.

     Si les partis marocains d'opposition, et dont certains sont dits pompeusement progressistes, rejettent violemment en parole — les solutions de partage auxquelles la raison d'état et leur destin compradore ont fini par acculer les états revendiquant le Sahara occidental, il n'en reste pas moins vrai que tous ces partis sont prisonniers de la même logique figée du national-chauvinisme bourgeois ou petit-bourgeois. La nature de classe de ces partis en fait et fera toujours les clairons intermittents du lyrisme nationaliste inconséquent. Leur incapacité d'organiser ou de diriger un quelconque mouvement de masse rangera bientôt leur violence verbale a propos du Sahara Occidental dans le même musée que leurs envoléee passionnées d'hier à propos de la Mauritanie. L'histoire récente apprend que le flot du nationalisme bourgeois finit toujours par se jeter dans le marécage de n'importe quel plan Rogers.

Le Sahara Occidental Terre Arabe


     Palestine ou Sahara Occidental ne peuvent attendre le salut commun que des millions de fidayins que seront tous les arabes, du Golfe à l'Atlantiqne : une même solution pour détruire tous les Israëls.

La Révolution Arabe

     Cette voie seule assurera à notre cause l'appui autrement plus précieux que tous les votes de I'O.N.U., l'appui et la soliaarité agissante de tous les peuples en marche. Le peuple révolutionnaire espagnol ec les pacriotes dans les Canaries reconnaîtront nécessairement en lui, en ces millions de fidayins leur compagnon de lutte. Car la révolution arabe n'est qu'un berceau parmi tant d'autres de la grande révolution mondiale.

     Nous savons pertinemment que certains bourgeois félons armés de pseudo-concepts marxistes rétorqueront que nous manquons de réalisme. Sans s'attarder à leur démontrer que nous sommes heureux de manquer de cet opium des lapins peureux rongeant leur carotte de coexistence pacifique en aspirant au nirvana, attelons-nous à la tâche de ceux qui osent vaincre et lançons en peu de mots l'appel qui libérera chaque pouce de notre grande patrie en libérant tous les travailleurs arabes : un front commun arabe de Palestine au Sahara Occidental.

     Pour les progressistes ou révolutionnaires en parole rappelons ce mot du peuple : la langue ne contient pas d'os.
                                                                                      SOUFFLES