LE GACHIS


relâcher l'Histoire

 

pp. 1-14


     L'histoire de l'art marocain est depuis plus d'un demi-siècle une spécialité européenne, un monopole de la science occidentale.


     Il importe peu d'entrer ici dans la polémique qui consiste à ne voir, dans les tentatives récentes entreprises par des nationaux en vue de reconsidérer notre art, qu'une curiosité artificielle née dans la lecture des œuvres analytiques et critiques étrangères. L'intérêt, si tardif soit-il, que nous pouvons porter à notre art (les causes de ce retard sont évidentes) ne relève nullement d'une fascination par la folklorité ni d'un mimétisme bourgeois du goût qu'ont pris les étrangers pour lui. Si le spécialiste européen ou le simple collectionneur ont éveillé chez nous un intérêt pour notre propre art, cela ne veut pas dire que notre curiosité s'arrêtera à la concurrence dans la chasse au trésor ou à l'admiration chauvine pour nos traditions artistiques. La connaissance et la valorisation de ce patrimoine rentrent au contraire dans le cadre d'une volonté de récupération totale, indispensable pour notre restructuration.


     Mais dans le domaine culturel comme partout ailleurs, l'action ne nous appartient pas encore. L'escalade scientifique étrangère continue sous d'autres formes qu'avant l'indépendance (1). Elle se maintient, indifférente à nos piétinements, à notre besoin d'initiative et à notre soif de responsabilité.

     Tout le monde ne ressent pas avec la même acuité ce que nous venons de dire. La plupart se confinent dans l'acquit, quelles que soient ses origines. Ils ne ressentent pas tout le fondement dramatique de cette escalade où nous perdons chaque fois l'occasion de voir avec nos propres yeux et dans leur état virginal tel ou tel aspect de notre culture, la joie de découvrir par nous-mêmes tel document ou tel « fossile ».


     Cette intransigeance de notre part ne plaira d'ailleurs à personne (2). Ni aux nôtres, ni aux « chercheurs désintéressés » sur les traces des valeurs humaines et de l'anthropologie de l'universalisme. Notre malaise pour ces derniers n'est que jalousie, expression d'impuissance, recrudescence de fanatisme (3). Qu'importe. Voici les faits.


     Nous avons eu maintes fois l'occasion d'affirmer que nous traversions aujourd'hui une phase idéologique et culturelle des plus dynamiques. Quels que soient les conditionnements ou les limites imposés à l'action et à la recherche, une prise de conscience (certes restreinte, mais toute prise de conscience se déclenche ainsi) est en train de se dessiner au Maroc, appelée à lancer la génération présente (4) dans une entreprise décisive de déblayage et de reconsidération. Le temps est venu en effet pour nous de secouer les torpeurs du traumatisme colonial et de faire face à notre histoire. Mais lorsque nous voulons entamer cette confrontation, nous nous trouvons devant un legs des plus problématiques : celui des sciences humaines coloniales. Le phénomène colonial a été, en effet, une grave perturbation dans notre histoire (5)


     Et il faut, à ce niveau de réflexion, placer tout de suite une mise au point. Il est apparu depuis quelques années une sorte de lassitude, voire de méfiance vis-à-vis de la dénonciation de l'ordre colonial. Et cette lassitude se manifeste conjointement dans certains milieux intellectuels nationaux et occidentaux. Je crois, pour répondre aux termes d'un essayiste marocain (6), que si « l'Occident nous colle à la peau », nous aussi nous collons désormais à la peau de l'Occident. Tant que l'Occident n'aura pas entrepris une hygiène totale, ne se sera pas dégagé de sa bourbe universaliste en nous y embourbant par généralisation, nous resterons une écharde de mauvaise conscience, inexorablement plantée en lui. Et nous ne cesserons jamais de le guetter dans ses faux-pas et faux-fuyants comme il nous a guettés depuis des siècles dans notre naïveté, barbarie et fatalisme. Ceci pour une clarté des idées, même si elle s'exprime dans la violence.

     Pour en revenir à cette confrontation avec notre propre histoire, nous constatons que chaque fois que nous abordons un domaine de notre culture, nous rencontrons l'Occident et ses savants. Devant tant d'érudition, d'acharnement à déloger le détail, devant cette maîtrise à brosser de larges synthèses, nous perdons parfois courage, tellement le cadre de notre propre recherche nous paraît restreint.


     Nous ne pouvons pas échapper à l'histoire que l'Occident nous a façonnée. Elle est une matière première colossale, une pépinière de renseignements. Mais elle est aussi un édifice de provocation, une souricière pour l'objectivité. La science coloniale et même post-coloniale nous lance un défi permanent. Elle est une intervention frelatée d'ambiguïtés.


     Ce qui nous gêne, ce n'est pas tellement le fait qu'elle existe, mais c'est qu'elle a déjà planifié à notre insu tout notre passé et présent, elle a structuré notre univers. Elle a découvert, rassemblé, regroupé en fonction de ses besoins notre matière historique et culturelle. Elle y a créé des cloisonnements et y a jeté des ouvertures, des hypothèses. Tel ouvrage devient « un classique » de l'époque almohade, tel autre un manuel de l'art marocain, etc... La science coloniale a aussi truqué, calomnié, détruit.

     Nous ne pouvons ni la contourner ni la rejeter. Nous ne pouvons pas non plus l'accepter. Nous sommes condamnés à la digérer et, à partir de là, à la trier.


     C'est en cela que réside la perturbation dont nous avons parlé plus haut. La remise en question que nous menons, et qui durera longtemps, est une phase sacrifiée, une somme de carburant gaspillée. Phase exaltante, nécessaire, authentique, tout ce qu'on voudra, mais sacrifiée. Il s'agit d'une longue perturbation, une lourde rançon. Mais nous l'assumons. Non pas pour nous laver ou pour calomnier l'éternel Occident impérialiste source-de-nos-malheurs, mais pour notre santé, pour notre lucidité, pour la vérité de l'homme.

     Franz Fanon voulait « lâcher l'homme » (le damné de la terre, l'opprimé). Il s'agit maintenant de relâcher l'Histoire de l'homme opprimé.


L'escalade scientifique


     L'escalade scientifique étrangère au Maroc n'a pas commencé en 1912. On peut déceler ses prémices dès les premières tentatives de pénétration coloniale et l'affirmation de l'influence européenne au Maroc. Mais elle s'est précisée surtout après la conquête de l'Algérie qui a sonné pour notre pays l'ère de la menace directe et pour le colonisateur le moment propice pour l'élaboration d'un plan médité de colonisation.


     On peut dire ainsi que l'exploration scientifique a précédé de loin la colonisation directe. Elle l'a en tout cas largement préparée et a tracé d'avance sa stratégie. Mais ce n'est qu'après l'établissement du Protectorat qu'une idéologie coloniale sur le plan socio-culturel, en fonction des « réalités indigènes » va se structurer et devenir un des piliers de la colonisation. Et ce sera surtout dans le cadre de l'Institut des Hautes Etudes Marocaines, fondé en 1920, et dans sa publication Hespéris, que va se déployer une frénésie de la recherche et une spéléologie culturelle des plus spectaculaires. L'I.H.E.M., patronné par Lyautey (7), le théoricien suprême du Protectorat marocain, va se donner pour tâche immédiate « l'exploration scientifique du Maroc » en une série d'enquêtes linguistiques (élaboration d'un atlas des parlers arabes et berbères), hagiographiques (atlas des zaouias, lieux de pèlerinage et de culte) (8), historiques (recherches pour reconstitution d'un fonds d'archives). L'Institut programmait aussi la mise sur pied d'une bibliographie marocaine. Mais les recherches ne s'arrêtaient pas là : elles englobaient tous les domaines relevant des sciences humaines et autres, notamment la géographie, l'ethnologie, ainsi que des études de « psychologie indigène » qui, pour G. Hardy, seraient immédiatement plus efficaces que des « analyses de l'âme musulmane ».


     « Nulle part moins qu'ici, ajoute le même Hardy, on ne trouve de cloisons étanches : universitaires, officiers, magistrats, administrateurs, colons, ingénieurs, etc..., tous les métiers, toutes les natures d'esprit sont représentés au sein de notre Institut ; même cette race vaillante, qui n'a de légèreté que les apparences — l'aviation — participe au labeur commun entre deux randonnées aériennes et nous fait voir sous un angle nouveau les horizons familiers » (9).


      Des vocations se développèrent au sein de cet organisme et des théoriciens s'affirmèrent : littérature (Basset, Laoust, Justinard), géographie (Célérier, P. de Cénival, Raynal), histoire (Michaux-Bellaire, de Castries, Terrasse), musique (Chottin), linguistique, (Biarnay, Lévi-Provençal, Laoust), arts (P. Ricard, Herber, Marçais, Terrasse), etc... (10).


     Somme toute, il s'agissait là d'un « assaut de seconde vague » moins « héroïque » que celui des troupiers, d'une « conquête obscure et patiente », selon les termes de G. Hardy, qui ajoute, dans un discours prononcé au cours du 5e Congrès de l'IHEM en 1925 : « Aux colonies, comme ailleurs, on ne fonde rien sur l'action toute seule, sur l'action qui se développe au jour le jour et refuse de se retremper méthodiquement aux sources de l'intelligence et de la recherche. Il est puéril et digne d'un figurant d'opérette de clamer sur tous les tons : Agissons, agissons, si l'on n'a pas au préalable éclairé les voies de l'action, déterminé les buts, étudié les moyens, et l'on peut, sans être prophète, prédire à coup sûr que tel chef de gouvernement colonial, qui, sous couleur d'esprit pratique et réalisateur, traite les géologues en collectionneurs de cailloux et les linguistes en grammairiens maniaques, n'accomplira que de toutes menues besognes et laissera le pays sans défense contre les hasards de sa vie physique et morale » (11).


     L'optique de la conquête scientifique au Maroc étant ainsi définie, il serait possible en passant en revue les différentes disciplines de démontrer pour chacune d'elle les motivations des travaux qui y ont été effectués et aussi leur apport à la colonisation (12). Il s'agit là en tout cas d'un travail de longue haleine, qui dépasse de loin le cadre de cette approche introductive. Faute de rentrer dans une critique thématique textuelle, nous nous en tiendrons pour le moment à la démarche et aux incidences globales de l'idéologie coloniale. Nous les regrouperons autour de trois axes : l'Assimilation, la Berbérophilie et le Conservatisme.


     Mais avant d'aborder ce tryptique, il faudrait attirer l'attention sur une constance fondamentale de la stratégie coloniale : la notion d'opportunité. En effet, une chronologie comparative des recherches scientifiques et des événements politico-militaires révèle des coïncidences nombreuses et significatives. Des recherches poussées pourront peut-être démontrer le caractère paradoxalement « prophétique » de la curiosité des savants coloniaux, en avance sur les événements politiques et sociaux. On pourrait, à titre indicatif, signaler le 5e Congrès de l'IHEM, tenu en 1925, et dont le but était d'établir un bilan des connaissances sur le Rif. Les événements apportèrent brutalement la réponse à cette objective curiosité : peu après, l'armée française intervenait définitivement dans la guerre du Rif et amenait la reddition d'Abdelkrim.


     Dans le même sens, une immense matière scientifique braquée sur la berbérophilie avait ingénieusement préparé la promulgation du dahir berbère en 1930.


     Un dernier exemple : les « conditions géographiques de la pacification de l'Atlas central » montrent combien une discipline scientifique peut devenir un auxiliaire fécond de la colonisation. Jean Célérier, dans une chronique consacrée au livre du Gal Guillaume portant le titre sus-indiqué, écrit à ce sujet (13). « La décomposition du grand bloc dissident de l'Atlas central en « taches » isolées dont la réduction successive fixe les étapes de la pacification a été guidée par la géographie physique » (14). Ainsi, « préparation politique » selon les termes de Lyautey et enseignement de la recherche géographique sont arrivés à bout du dernier îlot de résistance commandé par Moha ou Hammou.


     Par ces quelques exemples, nous ne voulons rien conclure. Mais cette notion d'opportunité est loin d'être une simple intuition. Elle pourrait à elle seule servir de fil conducteur à toute une série de recherches correctives et de confrontations. Elle montre déjà une des faussetés et des duplicités sur lesquelles reposent les sciences humaines coloniales.

L'assimilation

     La recherche scientifique coloniale relevait de la volonté d'une emprise rationnelle sur toutes les manifestations psychologiques, religieuses et culturelles de la société marocaine, sur les lois économiques, sociologiques et naturelles du milieu marocain. Il ne s'agissait pas, pour les spécialistes, d'un peuple ou d'un pays qu'il fallait doter d'institutions authentiques ou auquel il fallait constituer un patrimoine culturel ou scientifique, mais d'un « milieu hostile » dont la pénétration et la domestication nécessitaient une connaissance minutieuse, sans lacune, une connaissance orientée vers le pragmatisme et l'efficacité. Elle était orientée ainsi, consciemment ou inconsciemment, vers le rapprochement avec ce milieu, non pas tellement dans un but de compréhension, mais d'assimilation.


     L'assimilation est une voie confortable de l'idéologie coloniale. Elle repose évidemment sur l'esprit de supériorité et sur un égocentrisme qui ont été largement démontés et dénoncés, mais qui ont survécu à la colonisation et même à la décolonisation. S'il s'est trouvé autant d'intellectuels dans le Tiers-Monde qu'en Occident pour les décrier ou s'en laver, il n'en reste pas moins que les structures de la société et de la culture occidentales actuelles restent immanquablement égocentriques et imbues d'un sens plus ou moins inhibé de supériorité.


     La politique d'assimilation s'est manifestée dans tous les domaines où il était possible de démontrer biologiquement ou culturellement que l'indigène (le berbère en l'occurrence puisque, d'après l'idéologie coloniale, l'arabe n'est qu'un intrus, un conquérant passager comme les autres, un dominateur imposant une hiérarchie sociale incompatible avec la démocratie locale, et une culture officielle importée en contradiction pyschique et mentale avec la culture autochtone) (15), n'était qu'un frère de race mais déchu, resté en arrière, un « traînard » comme dirait E. F. Gautier (16).

      La colonisation était alors conçue comme une entreprise de salvation, une action qui s'inscrit dans la logique de l'histoire et qui a pour but une « normalisation » de l'histoire. La discontinuité historique et les strcutures paradoxales du pays à coloniser le vouaient irrémédiablement à l'intervention étrangère.

     Les spécialistes se sont archarnés aussi à trouver au Maroc un passé latin, des appartenances européennes et une vocations occidentale. Pour le passé et en ce qui concerne l'art, l'orientation des recherches archéologiques montrent bien une conformité à cette optique. L'héritage pré-islamique, punico-romain (assez décevant au Maroc malgré tous les efforts) a longtemps mobilisé les énergies. D'autre part, les rares traces d'édifices ou de lieux chrétiens ont toujours fébrilement alerté le chercheur. Les recherches consacrées aux monuments et à l'art autochtones eux-mêmes ne se sont jamais déroulées sans une manie de parallélismes, d'interférences et d'extrapolations. Chaque fois que le génie latin ou la présence chrétienne ont effleuré un domaine, ils étaient brandis en autant de références victorieuses.

     Mais cette politique assimilationniste allait trouver un terrain fertile dans la berbérophilie.

La berbérophilie

    Elle fut avant tout une couverture pour des visées politiques précises (l'œuvre pacificatrice et unificatrice du Protectorat ne pouvait se légitimer que si l'on parvenait à démontrer l'inexistence d'une nation marocaine).

     Edmond Doutté (17) déjà dans ses voyages au Maroc effectuées avant le Protectorat faisait bien la distinction entre l'arabe fanatique, hostile et le berbère cultivateur ou pasteur au tempérament affable et paisible. « Qui se souviendra, écrit-il, qu'au-dessous des seigneurs ambitieux et des agitateurs fanatiques, il y a l'honnête masse du peuple berbère qui ne demande pour se développer et pour travailler qu'un peu d'ordre et de justice ». Et il ajoute, prophétique, dans une note écrite bien après ces voyages : « Depuis que ces lignes ont été écrites, les événements ont répondu à cette dernière question : ce n'est ni à la faiblesse de son sultan, ni à l'aveugle aventure d'un maître de l'heure, ni à l'audace d'un usurpateur que la fortune a confié le soin des lourdes destinées du Maroc, mais bien au génie de la France ».


     Cette distinction si précoce servira de fil conducteur à diverses curiosités scientifiques et sera poussée à ses extrémités. Il était ainsi possible de distinguer de l'arabe belliqueux, conquérant, oriental, le berbère, colonisé éternel, attendant toujours le génie organisateur étranger pour acquérir de nouveaux moyens de dépassement. La colonisation européenne ne pouvait être que légitime, vu l'échec du conquérant de la veille à maintenir l'ordre et amener la prospérité et le progrès.


     Les études coloniales concernant le monde berbère furent menées dans une optique qui perturba toute objectivité et aboutirent, la plupart du temps, à la conclusion de la faillite de la greffe arabe : arabisation infiniment restreinte, islamisation superficielle vu la survivance des croyances et rites païens, organisation sociale et activités économiques antagonistes, origines ethniques et expressions culturelles différentes, etc...


     La berbérophonie n'était pas une tentative sincère pour sauver de l'oubli ou pour revaloriser une culture, une langue, une civilisation devant faire partie d'un patrimoine national ou universel, mais une option politique au service de la pacification et, plus tard, de la colonisation proprement dite.


     Mais elle fut une erreur capitale de l'idéologie coloniale lorsqu'elle s'attaqua concrètement aux institutions marocaines puisqu'elle marqua le déclenchement du mouvement national moderne.

Le conservatisme colonial

     Une autre voie de cette idéologie fut le conservatisme de l'œuvre coloniale. La colonisation au Maroc n'a pas connu véritablement les excès enregistrés dans d'autres pays où une destruction massive avait affecté les institutions locales. En 1912, le Far-West était encore possible, certes, mais pas à l'américaine. Lyautey fut en ce domaine un novateur hardi, un génie, mais pas dans le sens où l'entendaient ses adulateurs contemporains. Le conservatisme qu'il avait prôné fut une étape nouvelle dans l'idéologie coloniale. En 1912, les exterminations ne pouvaient plus être aussi massives qu'elles ne l'étaient au16e-17e siècles ou plus proche, en 1830. Le développement des moyens de communications et des relations internationales ont sensibilisé l'opinion européenne, et les puissances occidentales étaient entrées depuis longtemps dans une concurrence sans merci qui rendait chacune d'elle plus prudente dans ses agissements que par le passé. Mais le conservatisme lyautéen n'était pas là encore dicté par « l'amour » des institutions autochtones. Lyautey fut un mystique, mais un mystique de la colonisation. Son mysticisme est celui d'un stratège. Le conservatisme qu'il patronna sur le plan politique et socio-culturel était un instrument d'anesthésie, non un geste de respect ou d'admiration. L'emprise coloniale ne pouvait pas mieux prendre que dans un milieu sclérosé, maintenu ferme dans ses structures féodales et aristocratiques. C'est d'ailleurs parmi certains féodaux et chefs de confréries qu'elle trouva ses premiers interlocuteurs et même ses
informateurs en ce qui concerne la recherche (18).


     La colonisation qui se présentait comme une salvation et une libération du colonisé n'aura servi qu'à encourager une stagnation culturelle mais, ce qui est plus grave, elle a abâtardi et détruit parfois tous les secteurs où le colonisé manifestait encore librement sa création.

Le banditisme culturel

     Le pillage des pays anciennement colonisés n'a pas porté uniquement sur leurs ressources naturelles et la force motrice humaine, il a affecté également leur patrimoine culturel. Au Maroc, comme ailleurs, ce banditisme était « légal », sans effraction. Une matière vierge et abondante était là. On se servit. Administrateurs, officiers des Affaires Indigènes, contrôleurs civils, collectionneurs et érudits ont procédé à l'acquisition des objets d'art comme les colons procédaient à celle des lots de colonisation. Le pillage du patrimoine artistique s'est fait dans les mêmes conditions que celui du patrimoine foncier. Et ce n'est pas un hasard si l'histoire de l'art marocain a été réalisée avec les objets des collections particulières. L'administration du Protectorat avait certes doté le pays de « musées », mais, à faire le tour aujourd'hui de ces bazars vieillots, on se rend bien compte que la matière rassemblée est loin de constituer un répertoire d'information qui puisse aider à la recherche ou du moins à la simple connaissance objective.


     On n'a pas encore assez dénoncé cet aspect de la colonisation. Et au fait, qui l'a dénoncé dans le Tiers-Monde d'une manière suivie ? Si l'on s'accorde à ce que l'Afrique et l'Asie ont été systématiquement vidées de leurs trésors artistiques, personne n'ose plus aujourd'hui réclamer leur restitution. Aucun gouvernement, aucune association ou parti politique n'a programmé dans son action cette revendication. Il y a là un des paradoxes de la décolonisation. Or, il est un fait que certains des grands musées européens ont été de gigantesques institutions de recel. Leur universalisme et leur réputation reposent donc sur une longue histoire de brigandage au détriment des peuples du Tiers-Monde qui ont été privés d'une grande partie d'un héritage qui s'avère, dans cette phase actuelle de décolonisation, nécessaire pour la reprise de soi.

L'idéologie coloniale et l'Art marocain

     L'art marocain a été pour les érudits coloniaux une vraie « boîte à merveilles ». De toutes les disciplines culturelles qu'ils ont abordées, aucune ne les a aussi arrêtés et en même temps gênés que celle de l'Art. Si la littérature (surtout la littérature berbère) avait été jugée par plusieurs d'entre eux comme pauvre, « manquant de l'esprit créateur qui la sût mettre en œuvre : le Poète », de « l'imagination qui crée » (19), les réalisations artistiques au contraire éblouirent maints d'entre eux et leur arrachèrent de véritables élégies d'admiration.


     La richesse, la multiplicité des domaines artistiques se sont imposées tôt aux chercheurs. L'art au Maroc ne pouvait pas être nié ou camouflé. Il s'imposait à la fois dans les monuments historiques et dans tous les intermédiaires ou ornements de la vie quotidienne. La littérature eut aussi ses zélés et ses fidèles (Justinard), elle conquit même parfois, mais on l'étudia toujours avec une relative sérénité. Cela veut dire que la littérature que les érudits ont rassemblée et traduite ne représenta jamais à leurs yeux une matière susceptible de concurrencer sur le plan de la production ou des valeurs leur littérature propre. La littérature marocaine fut étudiée aussi surtout à des fins socio-ethnographiques et linguistiques.


     L'art, par contre, offrait un incroyable inventaire de formes et d'expressions plastiques qui a dû certainement provoquer un choc chez les spécialistes qui l'abordèrent. Ces derniers se trouvaient ainsi face à un répertoire artistique des plus inattendus, contrecarrant sur le plan esthétique et de consommation toutes leurs idées reçues et leurs habitudes d'appréciation. L'art arabo-musulman, comme l'art populaire rural et citadin, était un défi à l'académisme occidental, à ses principes de production et de consommation. En plus, il menaçait la quiétude du chercheur occidental (20) parce que pour la première fois, il aurait été obligé de se contredire et de faire avorter tout le système s'il allait jusqu'au bout de son raisonnement. Accepter l'idée que l'art marocain puisse être placé au même niveau que l'art occidental reviendrait à affirmer que le peuple dont il est issu peut se hisser au rang des peuples créateurs. L'hypothèque était là. On lui trouva de multiples solutions.


     Néanmoins, l'ampleur des études sur l'art entreprises au cours du Protectorat ne doit pas leurrer. Dans ce domaine comme dans les autres, le but n'était pas la revalorisation du sujet traité, même pas sa révélation au grand public. Il y a là un aspect de la recherche coloniale très peu connu. On se rend compte en effet d'une part que les recherches s'effectuèrent en vase clos et qu'elles s'adressèrent à un public très restreint de spécialistes qui s'informaient mutuellement en quelque sorte des trouvailles dans leurs domaines respectifs. D'autre part, les études qu'on considère encore aujourd'hui comme magistrales et comme matière de base ont été surtout descriptives, rarement interprétatives ou exhaustives. C'est pour cela que la bibliographie de l'art marocain se compose surtout de catalogues et de recueils inventoriels (tapis, bijoux, portes, medersas, greniers et citadelles, céramiques, dentelles, etc...). Dans les rares synthèses réalisées (ex. celle de G. Marçais), seuls les aspects historiques et sociaux sont relativement étudiés en détail, les aspects symboliques, plastiques ou visuels furent très peu explicités.


     Sur le plan méthodologique, l'étude de l'art marocain a été donc le fait d'érudits, soucieux beaucoup plus d'inventaire et de classification que d'analyse et de critique esthétiques.

     Mais lorsque les recherches échappèrent à la sécheresse descriptive et abordèrent l'appréciation, elles révélèrent nettement des préjugés artistiques, une orientation dogmatique qui, même dans un domaine aussi « neutre » que l'art, pouvait intercepter l'idéologie coloniale. C'est le cas du livre de H. Terrasse « Les Arts décoratifs au Maroc » (21), qu'il ne serait pas arbitraire de choisir comme « modèle » de ces études.


     Présenté par l'auteur comme « une grammaire élémentaire, une anthologie brève de l'art marocain », ce livre, par ses options arbitraires, par sa « mentalité » artistique, par l'idéologie qu'il recouvre ou qu'il recoupe, enfin par ses affirmations, retenues plus tard comme base de réflexion et d'appréciation, peut donner lieu aujourd'hui à tout un programme de remise en question (22).

     Le livre de Terrasse est divisé en gros en deux parties : « Les Arts Berbères et la Tradition hispano-mauresque ». Par cette division, l'auteur veut déjà marquer une des permanences de l'art au Maroc. Mais Terrasse n'accentue pas apparemment cette division au point de la pousser à une rupture. Parfois même, timidement, il recherche les lieux d'intersection, mais sans insister. En fait, tout le livre est construit sur cette dualité, d'où l'art berbère sort relativement glorifié. « Aux subtilités et à la richesse facile » de l'art hispano-mauresque, l'art berbère offre une simplicité vigoureuse, une majesté, un équilibre, un sens des masses et une souplesse de la composition. « Partout, ajoute l'auteur, il montre cette rare qualité : le dédain des effets faciles ».


     Mais ce que Terrasse affirme à propos de l'art berbère, et qui est vrai, apparaît sous un autre éclairage lorsqu'on le compare aux affirmations sur l'art hispano-mauresque. On a l'impression que toute cette exégèse n'est là que pour déprécier l'autre art. Et lorsque Terrasse aborde ce dernier, une rage étonnante traverse le texte, l'anthologie objective devient une sorte de pamphlet. Nous grouperons nos remarques à ce sujet autour de trois aspects : la formation, l'exécution (l'artiste) et l'expression.


     Terrasse affirme d'abord que l'art arabo-musulman au Maroc a été purement imitatif et importé. D'ailleurs, croit-il, lorsque l'Espagne musulmane sombra, il fut incapable de se renouveler ou de prendre d'autres formes d'expression. Ces idées nous rappellent évidemment la théorie selon laquelle la civilisation arabe n'a jamais pris de formes originales dans le pays et qu'elle fut tout au plus une greffe artificielle et encombrante.

     Dans le même ordre d'idées, cet art, pour Terrasse, n'a jamais exprimé les préoccupations ou les sentiments profonds du peuple marocain, puisqu'il lui fut imposé par des dynasties et des castes oppressives qui élevaient les monuments à leur gloire, sans même penser à continuer l'œuvre de leurs prédécesseurs. C'est ce qui a fait que cet art est resté « spasmodique, discontinu ». L'art arabo-musulman n'a donc pas été l'œuvre de tout un peuple et ne témoigne pas de son histoire ou de son génie créateur. C'est un art impersonnel et égoïste. Terrasse écrit ainsi : « Aux heures sombres, on ne se souciait pas même d'entretenir les monuments des époques de gloire. Jamais nouvelle dynastie ne continua les œuvres de ses prédécesseurs et adversaires ; mais elle les démolit quelquefois. Nos cathédrales françaises sont souvent l'ouvrage de plusieurs siècles ; si l'effort qui les produisait fut inégal, toujours il fut poursuivi ou repris. Lorsque nous les parcourons, nous sentons en elles l'œuvre d'une foule innombrable de morts, illustres ou obscurs, qui se sont unis dans une même pensée et comme tendus dans un même effort. Œuvres de tout un peuple, nous aimons en elles tout notre passé. Au Maroc, au-dessus d'une foule presque sans patrie, facile à rassembler et difficile à maintenir, dure à la misère et incapable d'effort prolongé, se sont élevés de temps à autre de grands ambitieux. Le pays tout entier s'est agité pour réaliser leur rêve trop souvent égoïste, rarement issu d'une pensée profonde et vraiment humaine. »


     Mais l'inertie de cet art n'est pas imputable uniquement à l'orgueil et l'inhumanité des dynasties, elle provient aussi de la mentalité de l'exécutant. L'automatisme et la répétition de formes congelées proviennent des artistes, simples « artisans » dont l'activité intellectuelle ou spirituelle dépasse rarement celle de manœuvres (23).


     « Devenir artiste, écrit Terrasse, n'est pas, au Maroc, obéir à une vocation impérieuse et faire naître en soi une force créatrice : c'est plus simplement apprendre un métier, s'assimiler les secrets d'une technique... Nulle distinction entre la forme et la matière, l'inspiration et l'exécution. Pareille conception de l'éducation artistique semble paradoxale, voire irréelle, elle traduit pourtant des faits constants et universels en ce pays. »

     L'auteur s'en prend enfin aux formes d'expression de l'art arabo-musulman surtout à « l'art décoratif » qui lui semble avoir été à l'origine un pis-aller technique résultant du manque de hardiesse, de la faiblesse inventive des architectes andalous qui ne surent pas, comme leurs homologues chrétiens, utiliser à bon escient les possibilités de la voûte, et qui évitèrent ainsi toute lutte contre la matière.


     Terrasse condamne l'art décoratif (décor géométrique, épigraphique, floral) selon les préjugés classiques et les canons académiques les plus reculés. Le jeu de fond triomphe pour lui dans cet art où n'existe nul « souci de vraisemblance matérielle... et qui a rompu tous les liens avec la nature. » Parlant du décor floral, il écrit : « Rien qui rappelle une fleur, une feuille réelles : rien qui fasse passer le frisson de la vie sur ce monde conventionnel. »


     Mais à cette absence de vie s'ajoute aussi, selon Terrasse, l'absence totale d'une pensée organisatrice ou d'une pensée réfléchie. L'art arabo-musulman n'a pas refusé uniquement la représentation de la vie (à cause, dit-il, de vieilles craintes d'origine magique, de textes obscurs interprétés dans un sens de plus en plus étroit » — thèse expéditive et erronée), il négligea aussi le symbole et se confina dans des recherches purement formelles : « il resta un pur décor, vide d'idées..., un uniforme splendide et un vêtement de luxe... Il ne traduit que des idées et des sentiments esthétiques. Il est un poème de lignes abstraites qui n'exprime que sa propre beauté. »


     Art détaché de toute réalité humaine, art déphasé pour employer un langage actuel.


     Le décor épigraphique passe ensuite au crible rageur de l'auteur. Loin de traduire une pensée mystique active, l'épigraphie musulmane ne reflète, selon Terrasse, que « la monotonie d'une liturgie rudimentaire ».

     Enfin le décor géométrique où l'on serait tenté de déchiffrer une inquiétude métaphysique, un vertige de la connaissance, l'expression de rêves indéfinis, n'est qu'un système d'entrelacs clos qui « tourne en rond et se répète indéfiniment. »


     Nous savons que les tendances et révolution actuelles de l'esthétique contemporaine apportent un démenti flagrant à toutes ces certitudes, dont il est difficile de ne pas rechercher l'origine dans des parti-pris (24). Le livre de Terrasse se termine d'ailleurs sur des accents bucoliques paternalistes qui annoncent tout un programme d'intervention et de dénaturation. Car, compris selon les schémas que nous venons de décrire, comment l'art marocain n'aurait-il pas été dénaturé par ses nouveaux « protecteurs » ? L'escalade scientifique en tout cas n'aura servi qu'à apprêter une matière documentaire énorme qu'elle a projetée dans un imbroglio de fausses pistes.

conclusion

      La remise en question des sciences humaines coloniales ne peut valoir si elle demeure une simple approche contestatrice de l'idéologie coloniale. Ce travail n'aurait aucune efficacité s'il reste, sur le plan de l'histoire, une tentative de vérification ou de réhabilitation et s'il ne débouche pas en définitive sur un éclaircissement et une emprise objective sur nos réalités actuelles. Car il s'agit aujourd'hui moins pour nous de trancher des problèmes historiques que de voir clair dans notre présent. Seulement, l'action sur le passé nous est nécessaire pour la compréhension de ce présent. L'histoire des peuples anciennement colonisés ne bénéficie pas de cette harmonie évolutive des pays colonisateurs. L'histoire de ces derniers est, dans une certaine mesure constructive, elle s'est développée en fonction de réalités authentiques selon les lois socio-économiques internes. Notre histoire par contre a été traumatisée, elle a connu avec la période coloniale un moment de discontinuité qui a brouillé sa logique intrinsèque. Par conséquent, tout bilan provisoire de nos réalités, toute mise en situation ont besoin de passer par la prise en considération des différents accidents qui ont affecté notre histoire de multiples ambiguïtés.


     C'est dans ce sens que nous avons écrit cette introduction (25).

                                                                                              abdellatif laâbi
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(1)   Voir dans « Réalités et Dilemmes de la Culture Nationale (II), Souffles 6,
        2e trimestre 67, le développement concernant ce problème.
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(2)   Je n'écris pas pour plaire, ni pour qu'on soit d'accord avec moi.
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(3)   « Fanatique » est le mot favori de l'historien colonial pour caractériser le marocain, surtout « l'arabe ».
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(4)   Celle de nos aînés nous a véritablement trahis au Maroc, ce qui n'a pas été le cas en Algérie, par exemple.
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(5)    Que la colonisation nous ait avancés dans le temps en nous faisant entrer brusquement dans l'ère industrielle et la vie moderne constitue un tout autre problème.
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(6)   qui vient de publier un livre sur « l'idéologie arabe contemporaine »
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(7)   Un nombre important d'ouvrages de recherche de cette époque était dédié à Lyautey.
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 (8)   On voit le rôle politique manifeste d'une pareille enquête.
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 (9)   Discours de G. Hardy, Directeur de l'Instruction Publique. Actes du 2e Congrès de l'I.H.E.M., in Hespéris, 1921, 4e trimestre.
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(10)  Nous ne donnons ces noms qu'à titre indicatif.
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(11)   Hespéris, 1925, tome V.
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(12)   L'auteur de cet article a déjà commencé ce travail qu'il envisage comme une remise en question globale des sciences humaines coloniales au Maroc.           L'auteur s'attachera aussi à l'aspect de révolution historique de l'idéologie coloniale, ce qui nuancerait évidemment les données de cet article.
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(13)   In Hespéris, 1948, 3e-4e trimestres.
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(14)   C'est moi qui souligne.
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(15)   Voir entre autres : « Arabes et Berbères », par le Général E. Brémond. Payot, Paris 1950 ; « La Berbérie, l'Islam et la France », par Eugène Guernier. Ed. de
        l'Union Française, Paris 1952.
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(16)  « Le passé de l'Afrique du Nord ». Payot, Paris 1952.
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(17)  E. Doutté, « En Tribu ». Geuthner, 1914. Voyages effectués entre 1901-1907.
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(18)   Abdelhaï Kettani fut une des sources précieuses des spécialistes.
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(19)   Henri Basset: « La littérature des berbères » (Carbonel, Alger, 1920).
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(20)   La plupart de ces chercheurs furent des conservateurs en retard sur les révolutions artistiques qui s'opéraient à cette époque en Europe.
         Terrasse ne cache pas son scepticisme vis-à-vis du « chaos fécond de l'art moderne ».
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(21)   H. Terrasse et J. Hainaut — Les Arts décoratifs au Maroc — Henri Laurens Editeur. Paris. 1925. Nous ne parlons ici que de H. Terrasse
         comme auteur. Il nous semble que la participation de J. Hainaut est surtout d'ordre graphique.
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(22)   Dans cette phase préliminaire de réflexion et de recherche sur notre patrimoine, il nous sera très difficile de nous attaquer aux grandes
         théories classiques émises par les auteurs coloniaux sur notre art.  Bien que dans toute démarche contestatrice l'intuition joue un grand
         rôle, il n'en demeure pas moins que c'est par une emprise scientifique que nous devrions entamer tout travail sérieux et à long terme. D'un
         autre côté, aucun travail de déblayage n'est possible si nous attendons que se forment cent archéologues, sociologues et spécialistes de l'art.
         Et s'il ne nous est pas toujours possible d'effectuer des confrontations décisives, nous pouvons par contre, sur le plan socio-historique et
         idéologique, opérer déjà un certain nombre de vérifications et de rectifications, nous pouvons au moins commencer à libérer notre
         matière artistique et son histoire des canevas étroits qui ont faussé depuis toujours sa communication, les restituer à une nouvelle
         perception.
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(23)  Terrasse suit ici une classification d'Ibn Khaldoun. Ibn Khaldoun, si l'on recense toutes les citations tendancieuses qu'on lui a extorqué,
         devient un champion de l'idéologle coloniale.
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(24)   Le lecteur se reportera aux passages sur la « Tradition plastique » dans les questionnaires de M. Chebaa et M. Melehi pour confrontation.
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(25)   Réalités et dilemmes de la culture nationale (III).
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