ahmed janati


al janaza

pp. 60-61


la meule tourne
lourde
de nos vomissements d'ulcérés
les vomissements de notre Nuit de brebis
                 ou à l'ombre de notre peur,
lourde
de nos mâchoires édentées
mordant dans la poussière de l'immense arène
                 de notre sous-développement.
Nous ferons ENCORE notre pain
de la farine-morphine de nos bourreaux.
Lourde de nos peaux desséchées
minarets de squelettes sur squelettes
épouvantail-muezzin.
Lourde de nos turbans de six mètres
                                           SALIS
qui ne servent plus à cacher la lionle de fronts baissés
et nous OSONS afficher sur nos fesses aux vents
lu fierté de ce Maroc des écoles primaires.
La meule tourne
meule de l'oppression et de la répression.
        Qu'importe qu'il ny ait plus d'eau dans vos ruisseaux
chevaliers des croisades don-quichottés
chaussez le guide baptisé corruption
et puisez dans le désert de notre soif
               les larmes et la sueur
de 15 millions moins quelques cents.
Non mon enfant
il n'y aura pas de printemps cette année encore
le chemin est long pour cueillir le sourire
dans nos tripes bétonnées
              de you-yous. Egalité. Progrès.
micros
serpents à sornettes.
Non mon enfant
tu n iras pas sur leurs boulevards

cimetières à néon et à linceuls importés
grossir la foule qui paie pour creuser sa fosse.
Nos ancêtres ont porté le fusil et fait parler la poudre
on arait cru les vautours chassés
                avec le drapeau des roumis
mais c'était notre mille et deuxième nuit.


Et je suis revenu vers toi
                terre ma mère
rechercher mes racines dans l'anonymat de ta souffrance
déterrer mon arbre généalogique
lien par toi accouché dans des draps déchirés
et recousus inlassablement du fil doré d'un fatalisme mortel
me laver du mot à la source amère de ton désespoir
partager la froideur de ta nuit hors-circuit touristique
Mais autour de toi un peuple qui t'ignore
un peuple de païens
                édifiant autel sur autel aux sangsues
attendant le miracle du ciel
ou les miettes des ogres
peuple
tes genoux sont pierres de ramper
troupeaux matraqués à coups de promesses
sur des chemins où les soleils meurent DEJA
et le bandeau ne pèse même pas
il a épousé tes os
car on ne t'a laissé qu'un squelette pour insensibiliser ta faim
ta langue gèle
on te montre le juif à insulter
                et tu l'insultes
et l'occident
nouvelle kaâba pour tes prières de désorienté
car le mal est en Nous
et l'on se crache sur les yeux la baraka du démon
au rythme des tambours
pour une amnésie millénaire.

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Aiimed Janati. Né à Abermoumou - 22 ans - Termine des études. Al Janaza est son premier texte publié.