souffles
                                      littéraires

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     C'est à partir du moment où un peuple commence à se chercher et à prendre conscience de sa réalite que sa position devient la plus dangereuse. Car il lui faut alors non seulement faire face à un état de siège permanent, mais encore aux agents destructeurs en son propre sein.

     Tout peuple opprimé a ses nègres (ceux que D. Lee appelle niggers) et ses noirs (blackpeople). Le combat doit se mener sur les deux fronts : noirs contre nègres, noirs contre blancs. C'est pour mieux situer ce combat que Don Lee divise la poésie en « poésienoire » et « poésieb-lanche ». Ce n'est pas là une position raciste, mais bien plutôt le reflet de la réalité : poésie du peuple opprimé, poésie de l'oppresseur. C'est ainsi que certains rimailleurs nègres écrivent de la «poésieb-lanche», le nègre fuit la poésienoire tout comme il fuit la réalité de son peuple, celle d'un peuple opprimé.

     Don Lee, poètenoir, se bat contre les nègres de quelque race qu'ils soient. Son combat, mené en Amérique, au sein de son peuple, rejoint celui de tous les peuples opprimés. Car, comme l'a dit David Hillyard, l'un des leaders du mouvement « Panthères Noires ». « C'est en combattant ici-même, en Amérique, que réside notre contribution à la libération de tous les peuples opprimés ».

     L'arme de Don Lee, dans ce combat, c'est le langage parlé par son peuple, langage franc, vigoureux et sans complaisance. La logique du français se prête mal aux exigences de cette langue afro-américaine, et le lecteur comprendra aisément les difficultés de la traduction. Ces difficultés se trouvent augmentées du fait que chaque mot a une connotation culturelle étrangère à l'univers du lecteur non afro-américain.

     Nous aurions aimé voir l'original figurer face à la traduction, mais cela étant difficilement réalisable, nous nous contenterons de quelques notes qui, nous l'espérons, serviront de guide au lecteur.

                                                                                          abderrahim youssi